Appel à communications
JOURNÉE D’ÉTUDE
Vers une nouvelle culture de la communication politique ? Pratiques communicationnelles, dynamiques des sphères publiques, usages et réceptions du politique
16 mai 2019 — Maison de la Recherche de l’Université Sorbonne Nouvelle Paris 3
Organisateurs : Camila MOREIRA CESAR et Jérémie DERHI
La communication politique traverse une série de transformations faisant émerger de nouvelles manières de produire, de diffuser et de consommer l’information politique. La concomitance des mutations des médias traditionnels (presse, radio, télévision), du développement des dispositifs comme des réseaux numériques et de l’augmentation de la part du politique dans l’ensemble de ces espaces sont des indices de ces changements et posent de nouvelles questions sur la place de la communication dans la construction du rapport au politique de nos jours. Parallèlement à l’importance indéniable de la dimensión technologique, des facteurs d’ordre social, politique et culturel alimentent également les dynamiques de renouvellement de ce champ d’activité. Ces facteurs renforcent l’argument selon lequel il faut « changer quelque peu la perspective sur la communication politique en élargissant le cadre d’observation à toute la chaîne des transactions, médiations et intermédiations qui aujourd’hui contribuent, interfèrent, facilitent ou contrarient la construction sociale des significations politiques » (Aldrin, Hubé, 2014). De ce fait, comprendre ces transformations et ces adaptations aux différentes logiques, formes et pratiques de communication politique est une nécessité dans l’histoire récente. Dans cette perspective, de nombreux phénomènes récents témoignent d’un renouvellement de la communication politique, sur lesquels cette journée d’étude souhaite fournir un éclairage et des clés de lecture. Le succès éclair et l’élection d’Emmanuel Macron en 2017 en France a montré la puissance du discours « ni de droite ni de gauche » dans un contexte d’éclatement de la gauche au terme du mandat de François Hollande (2012-2017) et d’affaiblissement des clivages politiques traditionnels. L’arrivée au pouvoir de personnalités critiques envers les fondements de la démocratie, à l’égard de la liberté de la presse et du parlementarisme, renforce l’affirmation de démocraties dites « illibérales » (Zakaria, 1997 ; Rosanvallon, 2001) en Europe centrale et orientale, à l’instar des situations en Pologne, Hongrie et Autriche, et met en exergue les contradictions de la démocratie à l’heure d’une survalorisation de sa dimension procédurale. De même, aux États-Unis, pays considéré comme l’une des démocraties les plus solides au monde, l’élection inattendue de Donald Trump aux présidentielles de 2016 traduit la fragilité des régimes démocratiques dans le franchissement d’une nouvelle étape quant à la dilution des frontières entre le monde de la politique et du spectacle (Dakhlia, 2008). Enfin, le « giro a la derecha » en Amérique latine depuis les années 2010 marque un revirement dans la région caractérisé par le retour au pouvoir des partis de centre-droite libéraux en Argentine et au Chili, la destitution des leaders élus et la montée de la judiciarisation de la politique, comme en témoignent les controverses autour de l’impeachment de la Présidente Dilma Rousseff et la condamnation de l’ancien chef d’État brésilien Lula. Bien que ces exemples présentent des caractéristiques et des causes disparates, ils se font l’écho d’un phénomène commun tant aux jeunes qu’aux anciennes démocraties : la défiance généralisée envers la chose publique, ses représentants et ses institutions. Or, cette défiance dont la forme revêt souvent celle du cynisme à l’égard de la politique ne signifie pas forcément un recul des aspirations démocratiques, voire un abandon du soutien à la démocratie comme régime politique (Dahl, 2000 ; Norris, 2011 ; Roberto, Mounk, 2016). Le déclin de la participation des citoyens à la vie politique via les modalités traditionnelles serait en effet compensé par d’autres formes de mobilisation et d’activisme en dehors des cadres institutionnalisés que sont les partis et les syndicats. Les mouvements de protestation, les boycotts, les débats, qu’ils soient en ligne ou hors ligne, autour des questions de genre, de race ou de classe sont autant de nouvelles problématisations politiques dans la sphère publique (Maigret, Macé 2005 ; Dalibert, Lamy, Quemener, 2016 ; Dalibert, Quemener, 2017) qui relèvent de ce scénario socio-politique complexe. Dans un contexte de diversification et de démultiplication des canaux et des réseaux d’information et de communication dans un espace public de plus en plus fragmenté (Miège, 2010 ; Neveu, François, 1999), cette journée d’étude propose d’analyser ces bouleversements et d’y repérer des transformations, des mutations mais aussi des constantes et des stagnations dans les objectifs, les formes et les pratiques de la communication politique contemporaine. En s’intéressant aux périodes, contextes et conditions de production, circulation et reception de cette dernière, cette journée cherche à comprendre comment se transforme le politique ainsi que les interactions entre ces variables dans diverses situations nationales, tout en insistant sur l’importance du numérique dans la configuration des rapports entre ces différentes sphères.
Les auteur.e.s des propositions de communications sont de ce fait invité.e.s à développer leurs réflexions à travers différentes perspectives et approches théorico-méthodologiques suivant l’un ou l’autre de ces quatre axes majeurs :
• Axe 1 : Pratiques et stratégies de communication
Ce premier axe vise à interroger les contenus, les styles, les formes de la communication des acteurs ou des institutions politiques traditionnels, au prisme des différentes conjonctures et situations nationales. En s’intéressant à la place de la communication au sein des lieux de pouvoir, pourront ainsi être explorées les pratiques communicationnelles mises en place au sein de différentes périodes, qu’il s’agisse des campagnes électorales, des politiques de communication établies durant les mandats ou des adaptations de la communication engendrées par l’utilisation des outils numériques. Des études empiriques autour de corpus discursifs ou visuels seront particulièrement appréciées.
• Axe 2 : Controverses et communication, discours médiatiques et journalistiques
Cet axe est ouvert aux communications orientées vers l'analyse du rôle des médiateurs dans la construction et la configuration d’un problème public. En considérant la communication comme un enjeu de pouvoir, il propose de se pencher sur les différentes dimensions et usages de la communication politique dans le débat public, tout en mettant en exergue les appropriations et traductions des scandales, des affaires et des conflits dans les médias et par le journalisme. Il s’agit là de chercher à comprendre la place des médiateurs dans le débat public ainsi que leur participation à la construction des grilles d’interprétation des discussions collectives dans l’espace public.
• Axe 3 : Opinion publique, sociologie électorale et pratiques infocommunicationnelles
Ce troisième axe pose la question de la réception de la communication politique tant dans sa dimension statistique par le biais de résultats d’enquêtes quantitatives que par l’analyse des pratiques et postures de la réception issue des méthodes qualitatives. Les travaux portant sur les rapports entre les habitudes informationnelles et les préférences politiques des individus seront au coeur de cet axe. Les communications privilégiant des publics peu étudiés ou ayant de nouvelles pratiques informationnelles, comme les « jeunes » par exemple, seront particulièrement appréciées.
• Axe 4 : Communication et émergence de mouvements contestataires
Cet axe propose d’étudier l’émergence de nouvelles questions politiques ainsi que les formes de mobilisations autour de celles-ci. Quel est le rôle de la communication dans la constitution et la visibilité de mouvements contestataires contre-hégémoniques ? L’analyse pourra porter sur les initiatives provenant de la société civile, sur les mobilisations en ligne et hors ligne à l’origine des mouvements de contestation qui animent le débat public, sur les nouvelles modalités de représentation et de mise en visibilité de ces mouvements ainsi que de la contestation de la parole politique dans l’espace public (Cardon, Granjon, 2010). Il s’agit d’étudier l'importance de la communication et le rôle des technologies numériques dans l'émergence des discours produits en dehors des cadres institutionnels dédiés, à l’exemple du Parlement, des syndicats ou des médias traditionnels.
Soumission des propositions
Les propositions doivent être envoyées en français à l'adresse nouvellecommunication2019@gmail.com en un fichier texte anonymisé, contenant le titre, un résumé de 1500 signes maximum (espaces et bibliographie non compris) comportant la description de l’objet, la problématique, l’approche envisagée, 5 mots-clés et les références bibliographiques. Les résumés feront l’objet d’un processus d’évaluation en double aveugle. Le corps de l’email devra inclure le nom de l’auteur(e), son rattachement institutionnel (Université/laboratoire/discipline) et une des dernières publications ou, le cas échéant, le titre de la thèse.
Lieu de la Journée d’étude
Maison de la Recherche de l’Université Sorbonne Nouvelle Paris 3 (4, rue des Irlandais 75005 Paris), salle Athéna. Métro 7 Place Monge – 10 Cardinal Lemoine ou RER B Luxembourg.
Calendrier prévisionnel
10 octobre 2018 : appel à communications.
15 décembre 2018 : date limite pour envoyer des propositions de communications.
Février 2019 : réponse aux auteurs.
16 mai 2019 : réalisation de la journée d’étude.
Comité d’organisation
Camila MOREIRA CESAR (U. Paris 3-Irméccen, UFRGS-Nucop)
Jérémie DHÉRI (U. Paris 3-Irméccen)
Comité scientifique
Anaïs THÉVIOT (UCO-Nantes)
Aurélie AUBERT (U. Paris 8)
Camila MOREIRA CESAR (U. Paris 3/UFRGS)
Franck REBILLARD (U. Paris 3)
Jamil DAKHLIA (U. Paris 3)
Jérémie DHÉRI (U. Paris 3)
Juliette Charbonneaux (U. Paris-Sorbonne)