CfP: Sociologies rurales dans le Sud global : le contexte du Maghreb

Call for papers, deadline 30 November 2020 (in French)

La revue de sociologie brésilienne « Contemporânea » de l’Université de São Carlos organise un dossier sur les sociologies rurales du Maghreb1. Ce dossier a pour objectif de:

i) familiariser les chercheurs brésiliens et, plus largement, sud-américains à la sociologie rurale maghrébine et

ii) à partir de l’espace maghrébin, penser le concept de post-colonialité dans une perspective analytique peu connue, et

iii) amorcer une interaction féconde entre les sociologues ruralistes issus (ou pas) des deux espaces géographiques.

Contexte

Après avoir été largement dominée par l’oeuvre d’auteurs allochtones qui ont joué le rôle d’auxiliaires du régime colonial, la sociologie2 rurale post-coloniale3 consacrée au Maghreb date des années 1960. Son avènement découle d’un besoin local et doit aussi à l’implication de plusieurs scientifiques d’origine allochtone (Pierre Bourdieu, Claudine Chaulet, Jean Duvignaud, Pierre Pascon, Ernest Gellner…), qui ont en outre participé à la formation des jeunes générations de chercheurs nord-africains. Dès le départ, la démarche des sociologues sera résolument critique à l’égard de la politique coloniale dont elle dévoilera, outre la recomposition multidimensionnelle de l’espace rural et la domination de sa population, l’exploitation des ressources et la fragilisation des structures du milieu considéré. Cette génération de pionniers s’engagera volontiers aux côtés de l’État-national en faveur de la modernisation et du développement des campagnes et du «changement des mentalités» de sa population pour partie semi-nomade ou fraichement sédentarisée.Au cours des années 70, influencée par la pensée marxiste et en résonnance avec un mouvement d’une ampleur mondiale, une frange des sociologues ruralistes maghrébins prendra ses distances vis-à-vis du pouvoir et en dénoncera pêle-mêle les choix en matière de politique de développent rural et agricole, en même temps que les inégalités socio-spatiales et la précarité rurale persistantes. Et ce, non sans en payer les frais (censure, baisse des dotations…). De nos jours, alors que les petits et les moyens paysans subissent l’expansion soutenue du capitalisme mondialisé, parallèlement à une circulation sans précédent du savoir et des idées, la place et l’apport de la sociologie rurale se sont étiolés en Tunisie et en Algérie, mais demeurent vivaces et prolifiques au Maroc. Dans tous les cas, quel que soit le pays considéré, la sous-discipline qui n’a pas échappé à l’influence de l’expertise et de la gestion, a perdu beaucoup de sa profondeur épistémique, de son innovation méthodologique et de sa verve politique. Dérivant de réponses à la commande publique (nationale et internationale) la recherche rurale maghrébine décrit désormais une posture plutôt utilitariste qui se focalise pour la plupart sur des thématiques et des objets génériques tout aussi mondialisés (développement durable, changement climatique, résilience, gouvernance, genre…) où l’étude des groupes et des rapports sociaux, au fondement de la discipline, sont de plus en plus dévoyés. Les débats théoriques ainsi que la formation de groupes épistémique se font rares, quant à l’influence et les interactions avec les différentes tendances théoriques épistémiques postcoloniales, développées aux Amériques et ailleurs (Edward Saïd, Anibal Quijano,Walter Mignolo…), elles sont absentes sinon éphémères, voire inconnues.

Plus récemment, dans quelle mesure peut-on affirmer que les contestations maghrébines consécutives à la crise alimentaire de 2007-08, suivies des révoltes déclenchées en Tunisie à la fin de 2010 à Sidi Bouzid (une région à forte densité rurale), participent-elles à la relance de la sociologie rurale ?

L’appel s’adresse aux chercheurs en sociologie investis dans les différentes thématiques en lien avec la sociologie rurale maghrébine. Les propositions devront se pencher sur les différentes tendances qui traversent la sociologie rurale postcoloniale depuis sa naissance jusqu’à nos jours, en mettant l’accent sur :

  • les espaces et les groupes sociaux ruraux privilégiés ;
  • les ancrages et ruptures théoriques, épistémiques méthodologiques à la sociologie coloniale ;
  • les homologies avec les théories postcoloniales.
  • Les démarches comparatives sont fortement appréciées.

Modalités de contribution

Les propositions soumises sont acceptés en français, en anglais ou en portugais. Les articles proposés en français et en anglais seront traduits également en portugais par la revue.

Les propositions sont à envoyer aux deux coordinateurs :

Mohamed Raouf Saïdi, saidi.raouf(at)free.fr et Alexsandro Arbarotti, arbarotti(at)gmail.com;

Elles doivent comporter :

  • le-s nom-s de-s auteur-e-s ;
  • un titre et un résumé n’excédant pas les 500 signes, assortis de 5 mots-clés (police Times New Roman 12, espace 1,5) ;
  • une courte bibliographie (5 titres).

Calendrier

  • Octobre 2020 : lancement de l’appel ;
  • 30 novembre 2020 : date limite pour l’envoi des propositions d’articles ;

  • 5 janvier 2021 : sélection des propositions et retours aux auteur.e.s ;
  • 15 mars 2021 : envoi de la première version des manuscrits (40 000, environ 25 pages)
  • 5 mai 2021 : transmission de la double évaluation externe aux auteur.e.s ;
  • 20 juin 2021 : envoi de la deuxième version des manuscrits ;
  • Juillet, août, septembre 2021 : traduction des manuscrits ;
  • Janvier 2022 : parution de la revue

Notes

1 Le Maghreb («Le Couchant») doit son nom à sa position géographique par rapport au Machreq («Le Levant»). Il désigne l'Occident nord-africain qui comprend cinq pays : Maroc, l'Algérie et la Tunisie, la Libye et la Mauritanie. Le présent appel sera uniquement focalisé sur les trois premiers.

2 Souvent indissociable de l’anthropologie.

3 Nous distinguons entre la post-colonialité (avec tiret) entendue comme repère historique et la postcolonialité comme référentiel épistémique.

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