Cette double journée d’étude examinera une série de questions sur les formes d’activité politique dans lesquelles les femmes se sont engagées. Par là, nous entendons les formes d’activité qu’elles-mêmes considéraient comme politiques, ou qu’aujourd’hui on considérerait comme telles. C’est ainsi qu’au-delà des activités « traditionnelles » qui orientent la prise de décision, la revendication de droits ou l’organisation de la cité, nous nous intéresserons aussi à ce qu’on a appelé la « politique informelle » qui se déploie en marge des lieux habituels du pouvoir et du gouvernement de la chose publique. Nous considérons la période du début du XIXe siècle (1789-1850) comme particulièrement importante pour cette thématique : d’abord, du fait des perturbations importantes qui ont lieu alors en Europe, durant la Révolution française et pendant la période de domination napoléonienne ; ensuite, du fait des répercussions de cette révolution sur d’autres rébellions et insurrections populaires contre le statu quo européen. L’instabilité politique a souvent multiplié les opportunités et les occasions d’agir. De ce fait, la période voit l’émergence de nouvelles formes d’organisation dont, dans certains pays, des sociétés de femmes ; dans d’autres pays divisés par la guerre, les femmes participent activement aux formes de résistance et à leur organisation. Dans le même temps, ce qui a souvent débuté à partir d’initiatives très locales finit parfois par contribuer, au fil du temps, à l’émergence d’un lexique de politique populaire et d’idées politiques de plus en plus partagées entre les États européens. On sait que libéralisme, le socialisme, le communisme et le conservatisme émergent comme des idéologies organisatrices pendant cette période, ce qui induit parfois de nouvelles questions sur la situation, le rôle et la place des femmes dans le système politique.
Axes thématiques
Nous souhaitons explorer, par ces deux journées d’étude, l’éventail des possibilités dont les femmes se sont emparées dans l’Europe du début du XIXe siècle, dans cette période de contestation et de confrontation croissantes, de plus en plus associées à des demandes politiques de réforme ou de différentes formes de reconnaissance.
- À quels moments, comment, à quelles fins et avec quelles aspirations les femmes ont-elles agi ?
- Quelle conscience de rompre avec les attentes coutumières et les rôles traditionnels ont-elles manifestée ?
- Leur activité a-t-elle divergé des modèles de sociabilité et d’association existants, ou les a-t-elle développés ?
- Quels défis et quelles opportunités la guerre et la révolution ont-elles ouvertes aux femmes ?
- Dans les États qui ont évité la guerre, en particulier la guerre civile, quelle place les femmes ont-elles pu se tailler dans l’évolution politique de leur monde ?
- Comment ont-elles réfléchi à leur propre activité, l’ont-elles identifiée comme « politique » et de quelle manière (quel sens ont-elle mis sur l’adjectif « politique ») ?
- Comment leur entourage les a-t-il jugées, et comment a-t-il réagi ?
- Comment, en tant qu’historien·nes, doit-on analyser ces pratiques politiques ?
La littérature sur la sociabilité des femmes a été dominée par l’étude de groupes sociaux relativement élitistes. Elle s’est, par ailleurs, fortement concentrée sur le début de la période moderne et le XVIIIe siècle. Cette double journée d’étude vise à déplacer les questions sur la sociabilité et l’engagement des femmes dans la cité vers cette période historique qui voit l’émergence de nouvelles formes de protestation et d’organisation populaires, afin de se demander jusqu’à quel point les outils et concepts des études antérieures pourraient être mobilisés sur une époque plus mouvementée et à travers un monde social et géographique beaucoup plus large. Alors qu’un lexique politique européen et un ensemble de mouvements se forment, il est important de réfléchir à la variété des rôles que les femmes ont pu se tailler dans ces nouvelles formes d’engagement souvent controversées.
Modalités de contribution
Les organisateur et organisatrice encouragent les personnes intéressées à soumettre des propositions de communication à Mark.Philp@warwick.ac.uk et à anne.verjus@ens-lyon.fr avant le 10 décembre 2021.
Comité de sélection
Les membres du comité chargé de la sélection des propositions de contribution sont :
- Anne Verjus, CNRS (Triangle, Ens de Lyon)
- Mark Philp, University of Warwick.