Social and Labour History News

CfP: Migrations qualifiées et intimités interraciales dans le Sud et l’Est global : (dés)activations des privilèges et (re)négociations des normes genrées (French)

3 months 1 week ago
Coordination

Hélène Quashie (IMAF/LARTES-IFAN)

Argumentaire

Ce numéro thématique engage des réflexions au croisement des études de genre et des migrations à partir des intimités interraciales, hétérosexuelles comme homosexuelles. Il interroge les modalités de rapports de pouvoir (liés à la classe, la race, l’âge, le genre, la nationalité) qui sont reproduites, contournées ou renversées dans les dynamiques de l’intime, en articulant celles-ci aux contextes sociaux, économiques et politiques dans lesquels elles s’inscrivent. En portant attention à des intimités transnationales interraciales liées à des migrations qualifiées vers des pays du Sud et de l’Est global, ce numéro accueillera des propositions d’articles qui n’ancrent pas leur terrain de recherche dans des contextes (post)touristiques (Bantman-Masum, 2016), jusqu’ici les plus étudiés. Malgré leur apport incontestable, ces travaux donnent souvent à voir des configurations spectaculaires (Geoffrion, 2017b), associées à des écarts d’âge et/ou de classe, qui nourrissent des enjeux de moralisation et laissent les intimités interraciales plus ordinaires dans l’ombre de la production des savoirs. Ce dossier thématique souhaite pallier cet aspect.

Des migrations transnationales face à des (re)configurations intimes postcoloniales

Les intimités hétérosexuelles et homosexuelles sont ici considérées sous des formes variées, qui mêlent sentiments, sexualités, arrangements domestiques et modèles familiaux transnationaux. Elles comprennent des situations de vie commune, partagée ou à distance, des mariages, des contextes de séparation temporaire ou définitive, et des divorces. Les formes de ces relations sont fonction des choix des partenaires, ainsi que des registres normatifs et juridiques des États dans lesquels ils.elles résident (Fresnoza-Flot, Keomanichanh, 2022).

Plusieurs travaux ont analysé les dynamiques d’intimités interraciales qui impliquent un.e partenaire venu.e du Nord, installé.e dans un pays du Sud ou de l’Est global. Ces recherches montrent que le genre exerce une influence sur les destinations géographiques, les formes relationnelles et les expériences migratoires (Croucher, 2013). Des villes d’Afrique de l’Ouest et d’Asie du Sud-Est (Fouquet, 2011 ; Bottero, 2013 ; Jaisuekun, Sunanta, 2022), comme de pays post-soviétiques et d’Asie de l’Est (Farrer, 2010), semblent davantage attirer des hommes occidentaux qui nouent sur place des intimités interraciales. D’autres zones urbaines d’Afrique de l’Ouest et de l’Est voient, à l’inverse, des femmes occidentales investies dans des relations avec des partenaires locaux (Salomon, 2009b ; Desprès, 2015ab ; Cauvin-Verner, 2016 ; Dragani, 2018). Les analyses de ces intimités ont souligné des dynamiques genrées qui permettent à des femmes blanches de faire l’expérience d’un « sentiment de pouvoir et de contrôle » (Croucher, 2013) et à des hommes blancs de retrouver une masculinité dominante (Farrer, 2010 ; Bottero, 2017 ; Jaisuekun, Sunanta, 2022 ; Valente Cardoso, 2023, Sizaire, 2024). Ces intimités dessineraient donc une « géographie genrée du pouvoir » (Mahler, Pessar 2001) associée à une blanchité hégémonique à l’échelle internationale.

Toutefois, il n’y a pas que des acteurs.trices blanc.hes qui circulent dans les strates sociales internationalisées et qui s’installent dans des pays du Sud et de l’Est global (Arab, Moujoud, 2024 ; Balizet, 2024 ; Gueye, Quashie, 2024). Tou.tes ne partent pas non plus d’Occident (Kim, 2025). De plus, l’articulation des dynamiques genrées avec les processus de racialisation constitutifs de ces intimités reste encore à explorer. Cette articulation n’efface en rien l’attachement émotionnel réciproque des partenaires (Geoffrion, 2016), qui peut perdurer en dépit de rapports de domination et de différenciation. Enfin, on note qu’une cartographie des désirs se superpose à un canevas postcolonial, incarné par les flux migratoires qu’attirent les pays du Sud et de l’Est global (Benson, 2013 ; Hayes, 2015 ; Fresnoza-Flot, Keomanichanh, 2022). Nous entendons par postcolonialité le résultat d’une partition entre des pays anciennement colonisateurs ou ayant bénéficié du colonialisme, qui n’incluent pas que des États occidentaux, et des pays anciennement colonisés ou ayant subi les sphères d’influence impériale. Cette division a façonné des différences structurelles et raciales entre Nord et Sud/Est global, et des réactions à ces différences. Ainsi, des formes de domination sont le fruit de logiques historiques renforcées par des enjeux néolibéraux, dans lesquels la question raciale alimente des systèmes d’oppression. Parallèlement, celle-ci peut aussi constituer un cadre d’émancipation (Du Bois, 2000), notamment dans des pays de l’Est et du Sud global où des mouvements politiques, économiques et/ou culturels ont encouragé des logiques de revalorisation raciale (Gordien, 2013 ; Quashie, 2024) et des mécanismes de mise à distance de l’Occident (Lan, 2021). Dès lors, les intimités transnationales interraciales qui se nouent ne donnent pas seulement lieu à des (re)classements sociaux et à des transactions culturelles (Desprès, 2015ab, 2017) : elles témoignent d’une plus grande complexité et peuvent bousculer les ordres hérités des « débris impériaux » (Stoler, 2013). Ce que ces intimités reconstruisent ou déconstruisent entre Nord, Sud et Est global reproduit, réorganise ou subvertit l’ancien ordre colonial de l’intime (Stoler, 2002), en s’inscrivant dans des espaces et « paysages » (scapes) transnationaux (Appadurai, 1990) qui (re)modèlent les imaginaires et les subjectivités. 

Ce numéro thématique accordera donc une attention particulière aux manières dont ces (re)configurations façonnent les mises en couple, unions, séparations, divorces et dynamiques familiales, et permettent de penser les processus de racialisation à travers l’intimité. Seront ainsi questionnées les diverses constructions sociales de la blanchité articulées aux migrations qualifiées vers le Sud et l’Est global (Hayes, 2015 ; Quashie, 2015 ; Ishitsuka, 2021 ; Cosquer et al., 2022 ; Camenish, 2022 ; Lan, 2025) et les mécanismes qui leur donnent forme par-delà les critères phénotypiques (Célestine, 2022 ; Horne Anwoju, 2023 ; Kalmar, 2023 ; Quashie, 2024). Produire une analyse située à partir des contextes sociaux, politiques, économiques dans lesquels se nouent ces intimités contribuera à interroger ou décentrer les conceptions hégémoniques de la race (Lan et al., 2023) et leurs imbrications aux rapports sociaux de genre et de classe. 

Espaces urbains et (re)positionnement des privilèges

Ce numéro thématique s’insère dans l’étude de l’accès inégalitaire et différencié à la circulation internationale (Terrazzoni et al., 2016) à partir de migrations peu entravées. Il réunira des analyses où l’un.e des partenaires investi.e dans une intimité interraciale transnationale devient privilégié.e (Croucher, 2012) dans le pays d’installation, grâce à son ou ses passeports, son contrat de travail et son capital économique et social. Résident.es principalement dans les zones urbaines des pays du Sud et de l’Est global, ces acteurs.trices qualifié.es ne sont pas tou.tes issu.es des classes supérieures de leur pays de départ. Ils.elles sont néanmoins diplômé.es et possèdent des compétences qui les valorisent sur le marché du travail global, comme ce peut être le cas de leurs partenaires locaux.ales. Ils et elles bénéficient également, dans les pays d’arrivée, de politiques souvent favorables à leur installation, de différentiels de monnaie avantageux, de meilleures opportunités de travail, de positions professionnelles plus élevées (Le Renard, 2019 ; Jones, Last, 2021 ; Quashie, 2022 ; Sizaire, 2024) et de soutiens communautaires via des réseaux d’entraide étudiants, professionnels et associatifs souvent constitués de concitoyens (Clément et al., 2021 ; Ishitsuka, 2021 ; Renaudeau, 2025). Ces conditions d’installation structurent des mobilités ascendantes, qu’incarnent les lieux et modalités de logement, les styles de vie, les loisirs et les hiérarchies sociales qu’ils traduisent. L’espace urbain joue alors un rôle crucial dans la construction de frontières sociales et l’exercice de privilèges (Clément et al, 2021) puisque les mobilités qu’il favorise engendrent des pratiques de reclassement. Fonctionnant comme un observatoire de l’activation et/ou de l’accumulation du « capital social en migration » (Bréant et al. 2018), l’espace urbain dans les pays du Sud et de l’Est global est aussi au cœur de processus de gentrification transnationale (Hayes, 2020). Que produisent ces dynamiques dans les lieux de résidence, de travail et de sociabilité des partenaires investi.es dans des intimités interraciales ?

Parallèlement, les acteurs.trices qui bénéficient de processus de re/surclassement grâce à une migration vers le Sud ou l’Est global doivent entreprendre un travail de réinscription locale de leurs ressources et capitaux multiples, dans des espaces régis par des normes et hiérarchies sociales distinctes de celles de leurs pays de départ (Clément et al., 2021). Leurs conditions de vie devenues avantageuses sont aussi ancrées dans des inégalités globalisées. Ces acteurs.trices font face à des dispositifs professionnels et juridiques parfois stricts, par exemple pour l’obtention de visa et permis de travail, sources de dépendances structurelles même pour celles et ceux qui détiennent un passeport occidental (Jones, Last, 2021 ; Cosquer, 2022 ; Fresnoza-Flot, Keomanichanh, 2022). Les différences entre régimes de protection sociale et d’accès aux soins, eux-mêmes conditionnés par les contrats de travail et systèmes fiscaux, peuvent entraîner des vulnérabilités (Renaudeau, 2025). Des modes de subversion peuvent également apparaître vis-à-vis de résident.es privilégié.es dans les dynamiques politiques, sociales et économiques locales (Gordien, 2021 ; Célestine, 2022 ; Quashie, 2022 ; Lan, 2025). Enfin, la compétition d’élites internationalisées ressortissantes de pays du Sud et de l’Est global, l’instrumentalisation commerciale de la blanchité, l’importance des langues locales ou encore la préférence nationale dans le champ professionnel peuvent limiter une domination occidentale (Ishitsuka, 2021 ; Lan, 2021), qui apparaît parfois en crise et source d’anxiété dans les échelles de classement social (Cosquer, 2022 ; Gordien, 2022). Le « privilège occidental » (Le Renard, 2019) ne permet donc pas toujours une ascension sociale durable dans les sociétés du Sud et de l’Est global (Camenish, 2022), et peut se heurter à des inégalités structurelles qui distinguent aussi les acteurs.rices privilégié.es entre elles.eux (Renaudeau, 2025).

A partir de l’angle des intimités interraciales, ce numéro thématique entend interroger ce qui (dé)structure socialement, économiquement et symboliquement des avantages et privilèges acquis par une migration qualifiée vers les villes du Sud et de l’Est global. Seront analysées les situations intimes qui maintiennent ou renforcent ces privilèges, autant que celles qui les affaiblissent ou les annulent. Comment ces derniers se transmettent-ils, se perdent-ils ou sont-ils réappropriés par les partenaires ou leurs descendant·es, et dans quels contextes ? Quelles sont les conséquences en cas de vie commune, séparation ou divorce ? Qu’induisent ces dynamiques dans les représentations identitaires (Geoffrion et al., 2023), les rapports de parenté et d’insertion familiale ?

Subjectivités et modes de (re)négociation pluriels

La question du privilège comporte aussi une dimension subjective. Les processus qui l’activent ou le désactivent se révèlent à travers les choix des partenaires, articulés à plusieurs régimes de genre en interaction voire en tension (Fresnoza-Flot, Keomanichanh, 2022 ; Sizaire, 2024). Les intimités transnationales interraciales sont souvent perçues au prisme des inégalités de classe, de race, de nationalité et d’âge. Mais elles donnent aussi lieu à des bouleversements des dynamiques de pouvoir comme à des situations de résistance et de contestation (Roux, 2011 ; Salomon, 2009a, 2012). Ces intimités produisent ainsi une connaissance particulière des structures sociales qui les encadrent et de ce qu’en font les acteurs.trices. Les partenaires impliqué.es apprennent en effet à se distancier de normes qu’ils.elles rendent discutables, négociables, révisables et qui font l’objet de réappropriations et de transformations quotidiennes (Sizaire, 2021). Par exemple, les choix des lieux de suivi de grossesse et d’accouchement (Renaudeau, 2025), de scolarisation des enfants ou de leur domiciliation en cas de séparation des parents, ou encore les aménagements domestiques face aux règles étatiques en cas de divorce, nourrissent des avantages, font perdre des privilèges et peuvent ré-agencer les relations de pouvoir dans l’intimité. La diversité des normes de genre (sociales, juridiques, légales, sanitaires, religieuses, culturelles), parfois contradictoires dans leurs contraintes, pousse les partenaires à opérer des arbitrages.

Ce numéro thématique souhaite interroger ce qui jalonne ces négociations, ce qui perturbe les relations de domination, comme ce qui construit des stratégies communes. Il s’intéresse aussi à ce que les négociations de l’ordre intime disent des relations entre les partenaires et leurs descendant.es, leurs familles et entourages. Des études sur les intimités d’expatrié.es occidentaux.ales installé.es dans le Sud et l’Est global montrent que l’entre-soi social et racial, y compris à travers la conjugalité, garantit l’exercice de privilèges (Cosquer, 2020). Qu’en est-il dans le cas d’intimités interraciales ? Favorisent-elles un isolement, des sociabilités majoritairement locales, ou des relations de proximité avec des acteur.trices inscrit.es dans les mêmes modèles intimes (Cauvin-Verner, 2016) ? Enfin, si les trajectoires venant du Nord sont souvent caractérisées de « migrations blanches » (Lündstrom, 2014), les partenaires issu.es de pays occidentaux peuvent être des personnes qui y sont racisées (Le Renard, 2016) et qui font l’objet d’une resignification raciale (Quashie, 2024) une fois installé.es dans le Sud ou l’Est global : comment cela affecte-t-il leurs négociations de l’ordre intime et leurs relations à l’entourage ?

Pour saisir au plus près ces enjeux, tenir compte des pratiques langagières peut s’avérer essentiel. Ces pratiques sont entendues comme sociales et politiques (Canut et al., 2018), en raison des manières dont elles peuvent (re)définir les identités raciales, genrées et sexuelles. Les pratiques langagières informent ainsi sur les représentations que les partenaires véhiculent des sociétés d’appartenance de chacun.e, sur les différenciations qu’ils co-construisent, comme sur leurs compromis et arrangements. Les usages linguistiques, entre elles.eux et avec leur entourage, peuvent souligner des dimensions racialisées du quotidien intime, des rapports de pouvoir et leur renversement. Par exemple, lorsque les partenaires ont davantage recours à une langue européenne qu’à une langue locale. Ou quand cette dernière n’est comprise que par l’un.e des partenaires et augmente ses choix ou marges de manœuvre dans les négociations quotidiennes de l’ordre genré, dans ses interactions avec l’entourage et vis-à-vis des règles institutionnelles et légales qui régissent l’intime (Fresnoza-Flot, Keomanichanh, 2022). Ainsi, comment les pratiques langagières reproduisent-elles ou entravent-elles des formes de hiérarchisation sociale ? Dans quels contextes les langues des sociétés du Sud et de l’Est global sont-elles investies par l’un.e ou les partenaires comme vecteur d’insertion sociale ? Quels privilèges se trouvent alors disqualifiés ou renégociés ?

(Re)constructions des masculinités

Les intimités transnationales donnent à voir des productions sociales renouvelées des féminités et des masculinités au croisement des normes des sociétés d’installation et de celles des pays de provenance des partenaires. Ce numéro thématique souhaite particulièrement prendre en compte les processus de (re)construction des masculinités au sein d’intimités interraciales. Ces processus restent moins explorés, qu’il s’agisse de partenaires masculins qui migrent vers un pays du Sud ou de l’Est global (Bottero, 2013 ; Croucher, 2013 ; Fresnoza-Flot, Keomanichanh, 2022) ou de partenaires originaires des pays d’installation (Salomon, 2009a ; Desprès, 2021). Moins nombreux sont les travaux qui leur donnent la parole et qui décrivent finement leurs trajectoires biographiques et sociales, ainsi que les projets que ces hommes poursuivent – contrairement à leurs homologues féminins qui font davantage l’objet d’analyses (Geoffrion, 2017a). Les partenaires masculins de ces intimités sont en outre souvent dépeints comme réactionnaires et abusifs, valorisant des inégalités genrées à leur avantage, et profitant d’une ascension sociale et d’une plus grande liberté sexuelle (Farrer, 2010 ; Bottero, 2017 ; Desprès, 2021 ; Sizaire, 2024). Mais ces descriptions ne permettent pas d’accéder à toute la palette de situations qui concrétisent les intimités interraciales dans lesquelles ils s’engagent, comme les luttes sociales que les partenaires masculins peuvent mener face à certaines normes locales, leurs logiques subversives dans des rapports de force en leur défaveur (Salomon, 2009b, 2012), les contextes où leurs privilèges ne vont pas de soi (Fresnoza-Flot, Keomanichanh, 2022), leur rôle de conseil vis-à-vis de la société locale (Renaudeau, 2025), ou encore leurs difficultés à performer des modèles de masculinité racialisée attendue de leur partenaire (Salomon, 2009a ; Sizaire, 2024).

Ce numéro thématique questionnera les façons dont les processus de (re)construction des masculinités maintiennent ou transforment les ordres genrés des intimités interraciales, et ce qu’ils soulignent des (re)configurations postcoloniales à l’œuvre dans le Sud et l’Est global. Cet angle d’analyse permettra de partir des points de vue et subjectivités d’hommes qui s’installent dans des sociétés où leurs avantages et privilèges peuvent être activés ou désactivés. Comment cela transforme-t-il les perceptions de leur masculinité ? Les rapports de pouvoir s’en trouvent-ils déplacés ? Il sera tenu compte des différences dans les trajectoires et pratiques de partenaires masculins racisés au Nord qui se (ré)installent dans un pays du Sud ou de l’Est global. Les analyses attendues s’intéresseront également aux acteurs masculins locaux investis dans des intimités interraciales, pour comprendre ce qu’induisent à leur égard les positionnements de leurs partenaires. Observe-t-on des mécanismes de réappropriation ou de renversement des avantages et privilèges de ces dernier.es, des retournements des normes de la masculinité dominante contre elle-même (Broqua, Doquet, 2013), ou encore des modes de distinction vis-à-vis d’hommes qui ne s’inscrivent pas dans des intimités interraciales (Despres, 2021) ? Ces partenaires locaux font-ils l’objet de resignifications raciales en raison des intimités qu’ils choisissent, et cela affecte-t-il les représentations de leur masculinité ? Enfin, quelles conséquences ces dynamiques ont-elles dans la socialisation familiale, tant pour les partenaires migrants que ceux issus des sociétés locales ?

Sont inclus dans ces interrogations les processus de (re)construction des masculinités à travers les

intimités interraciales homosexuelles – en tenant compte aussi des différences dans les trajectoires et pratiques de partenaires masculins racisés au Nord (re)venus dans un pays du Sud ou de l’Est global, et dans celles de partenaires locaux. Certains avantages et privilèges acquis par la migration vers le Sud ou l’Est global transforment-ils les mobilisations et masculinités militantes au sein des minorités sexuelles locales ? Protègent-ils de contextes hostiles aux communautés LGBTQI+ ? Quels avantages et privilèges apparaissent au contraire fragilisés ou perdus dans les contextes d’installation ? Quelle influence ces processus ont-ils sur les imaginaires et représentations de l’intimité homosexuelle, ainsi que sur les dynamiques familiales ?

Épistémologie et méthodes de recherche

La question des méthodes et de leurs enjeux épistémologiques est un point transversal aux interrogations que soulève ce numéro thématique pour comprendre les imaginaires et pratiques qui organisent les intimités interraciales transnationales dans des sociétés du Sud et de l’Est global. Que dit l’exercice réflexif des choix d’enquête opérés dans ces contextes situés ?

Dans la mesure où la sphère de la vie affective présente des situations plus ou moins dicibles, impliquant des analyses plus ou moins restituables, l’approche méthodologique apparaît centrale. Elle reste pourtant peu explorée, si ce n’est dans le cadre d’études spécifiques auprès de partenaires féminines (Geoffrion, 2017b) et homosexuels (Broqua, 2000, 2009), ou dans des travaux récents sur les sexualités (Brasseur et al., 2022). Or, interroger les normes et pratiques intimes implique de prendre en compte les manières de les dire, qui sont différentes selon les contextes sociaux et les trajectoires des acteur.trices. Quelles méthodologies rendent compte au plus près des subjectivités et des façons de parler d’intimités interraciales ? Quelle éthique adopter face aux dynamiques de pouvoir qui construisent des acteurs.trices dominant.es (Cosquer, 2019) ?

Un détour par les pratiques langagières peut nourrir cet enjeu réflexif, d’autant que la majorité des recherches engagées depuis les pays du Nord n’ont pas recours méthodologiquement aux langues des sociétés du Sud et de l’Est global. Celles-ci révèlent pourtant des façons de penser, de dire et de raconter des expériences genrées et racialisées, tant pour les acteurs.trices que pour les chercheur.es, qui sont différentes de ce qui s’exprime dans les langues européennes (Quashie, 2020). Les acteurs.trices peuvent aussi modifier leurs pratiques langagières, naviguer entre plusieurs langues pour mettre à distance des émotions liées à leur intimité, ou s’exprimer selon ce qu’ils.elles se représentent des attentes et imaginaires des chercheur.es qu’ils.elles rencontrent. Aussi, avoir recours aux différentes langues des partenaires et de leur entourage peut s’avérer indispensable : à quelles autres méthodes ce chassé-croisé linguistique peut-il se combiner ?

Enfin, les réflexions autour des outils et méthodes de recherche sont liées aux enjeux épistémologiques de la positionnalité des chercheur.es. Les enjeux de statut social, de rapports sociaux de sexe et de race dans des contextes postcoloniaux concernent aussi ces dernier.es, dans les sociétés où ils.elles mènent leurs travaux et dans celles d’où ils.elles proviennent. Analyser la positionnalité des chercheur.es dans l’étude des intimités interraciales transnationales contribue ainsi aux réflexions sur les imbrications situées des rapports sociaux de genre, de race et de classe.

Modalités de soumission des articles et calendrier du numéro

Les propositions d’articles de 600 à 1000 mots, suivies d’une courte bibliographie, sont à soumettre à helenemv.quashie@gmail.com et daniel.rochat@ulouvain.be

d’ici le 30 septembre 2025.

Ces propositions seront accompagnées d’une notice biographique des

auteur.es, incluant leur statut académique, rattachement institutionnel et courriel. 

15 octobre 2025 : Les auteur.es seront averti.es des contributions présélectionnées.

20 décembre 2025 : Les auteur.es retenu.es seront invité.es à envoyer leur article conformément aux consignes de la revue (https://journals.openedition.org/rsa/139).

Évaluation

La procédure est organisée en deux temps.

1° Sélection des propositions de contributions sur base des résumés envoyés pour le 30 septembre 2025. Communication aux auteurs le 15 octobre 2025.

2°Les articles retenus (réception pour le 20 décembre) seront évalués selon une procédure en double aveugle. Avant leur envoi aux auteurices, les évaluations sont examinées par la coordinatrice du dossier en collaboration avec le comité de rédaction de RS&A afin d’apporter les éventuelles nuances/précisions utiles.

Bibliographie

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Personnes de contact:

  • Daniel Rochat
    courriel : daniel [dot] rochat [at] uclouvain [dot] be
  • Hélène Quashie
    courriel : helenemv [dot] quashie [at] gmail [dot] com

CfP: Cities and Decolonization: Anti-colonial Struggles, Urban Protest, and Global Solidarities

3 months 2 weeks ago
Organizer: Norman Aselmeyer, Oxford; Eric Burton, Innsbruck Location: University of Oxford, Wadham College Postcode: OX1 3PN Location: Oxford Country: United Kingdom Date: 19.03.2026 - 20.03.2026 Deadline: 30.09.2025

The aim of the workshop is to reassess the relationship between the city and the struggle for decolonization in the colonial world. It brings together scholars examining anti-colonial movements in specific urban contexts in the twentieth century. The workshop seeks to foster dialogue on the relationship between anti-colonial protests and colonial cities in Africa and Asia, exploring how these struggles were shaped by diverse social groups, the spatial organization of urban environments, and the tensions between competing visions of anti-colonial practice.

Cities and Decolonization: Anti-colonial Struggles, Urban Protest, and Global Solidarities

Workshop description
What role did cities play in shaping the dynamics of twentieth-century decolonization? This question continues to captivate scholars across disciplines. Contemporaries perceived revolutionary movements as originating from urban hubs and radiating outward into rural regions. Aristide Zolberg evocatively characterized anti-colonial movements as “creatures with a relatively large head in the capital and fairly rudimentary limbs.”1 In contrast, postcolonial thinkers like Frantz Fanon, significantly influenced by Marxist scholarship, insisted that “the peasants alone are revolutionary.”2 Historian Raymond Betts proposed a nuanced interpretation, suggesting anti-colonial movements were simultaneously “rooted in the countryside and grounded in the city.”3

In recent years, research in anthropology, political science, and history has increasingly shifted focus toward the role of cities and urban populations, emphasizing the urban dimension of anti-colonial protest and the complex connections between urban centers and rural hinterlands in shaping anti-colonial resistance. As political scientist Jeffrey Herbst has argued, “nationalist politics in the 1950s and 1960s were very much urban affairs.”4 The most recent literature on cities as centers of anti-imperial activism has shown how colonial metropoles like London (M. Matera), Paris (J. Boitin; M. Goebel) or Brussels (M. Louro; D. Laqua) emerged as nodal points for activists in the interwar period and after World War II. Non-colonial or semi-colonial cities in Asia could also be hubs of anti-colonial networking in the interwar or postwar period, including Beijing (R. Leow), Hanoi/Saigon, or Bangkok (C. Goscha). From the late 1950s, governments of newly independent states in Asia and Africa became sponsors of anti-colonial organizations, turning cities into “hubs of decolonization” (E. Burton). Across postcolonial Africa, cities such as Accra (M. Grilli), Cairo (R. Abou-el-Fadl; J. R. Brennan), Dar es Salaam (A. Ivaska; G. Roberts), Algiers (J. Byrne), Léopoldville (L. Passemiers), Lusaka (C. Chongo, H. Macmillan) and Maputo (N. Manghezi) harbored liberation movements and provided infrastructures to mobilize followers, engage with international actors and get access to transnational audiences and support. Afro-Asian connections with cities such as Bombay, Rangoon, and Delhi also played a role here (C. Stolte; G. McCann), as did links to Havana and growing Tricontinentalism (A.G. Mahler; R. J. Parrott).

This recent scholarship emphasized significant variation across regions and contexts. The dynamics of resistance differed between trade and settler colonies, as Jean Allman has pointed out, and were further shaped by the specific character of colonial rule, the diversity of local cultures of resistance, and the distinct temporalities of decolonization.5 Some regions, such as the so-called “hinterland countries” (J. Herbst), that is, countries lacking densely populated urban centers, followed markedly different trajectories. Moreover, decolonization was not solely an elite-driven or urban-centered process. Elizabeth Schmidt’s work on Guinea compellingly demonstrates that nationalist narratives were often imagined and propelled “from below,” shaped by a wide range of actors (including urban workers, women, peasants, and military veterans) rather than imposed by political leadership from above.6 Similarly, John Lonsdale’s concept of “moral ethnicity” underscores the significance of local political languages and ethnic frameworks in shaping nationalist politics in Kenya.7 The complexities of twentieth-century decolonization demand a nuanced understanding of the urban-rural interface in anti-colonial movements. Drawing on the various strands of recent scholarship, the workshop aims to reassess the distinctive role cities played in shaping the trajectory of decolonization.

Focus areas: actors, venues, and tensions
The workshop advances current approaches to anti-colonialism by rethinking the urban histories of the struggle against empire through a focused examination of actors, venues, and tensions. By grounding discussions in the lived experiences of historically overlooked groups (across lines of class, gender, religion, and age) the workshop foregrounds the diverse actors who shaped anti-colonial protest on the ground, moving beyond purely elite narratives. Special attention is given to the spatial strategies employed by urban crowds, exploring how both major cities and smaller towns, as well as their hinterlands, became venues of unrest, organization, and resistance, and how the relationships between these spaces influenced the broader anti-colonial struggle. The workshop also seeks to complicate conventional understandings by investigating the role of labor and neighborhood movements, the significance of liminal spaces, and the moments when activism was blocked or constrained. This line of enquiry will also pay attention to everyday practices of anti-colonialism, asking for the quotidian dimensions and prerequisites of political and ideological work. By probing the tensions between competing visions and practices of anti-colonialism, the workshop aims to produce a nuanced analysis of how anti-colonial efforts, including their failures, contributed to reconfiguring strategies and solidarities across Africa and Asia. Ultimately, this approach moves beyond comparative frameworks to reveal the complex entanglements and ongoing legacies of urban anti-colonial protest, connecting historical struggles with contemporary debates over urban space and colonial heritage.

Application and funding
To express your interest in the workshop, please submit a title and abstract (max. 300 words) matching one of the aforementioned areas and a brief CV to the organizers Norman Aselmeyer (norman.aselmeyer@history.ox.ac.uk) and Eric Burton (eric.burton@uibk.ac.at). The deadline for submission is 30 September 2025. Applicants will be notified of the outcome by mid-October 2025.

The workshop is jointly organized by Norman Aselmeyer (University of Oxford) and Eric Burton (University of Innsbruck), in collaboration with Wadham College, Oxford. Meals and accommodation for all accepted participants will be provided by the college. We are currently seeking funding to support travel costs; please indicate in your application whether you would require financial assistance for transportation.

The workshop will be held in person at Oxford. A publication of the proceedings is intended.

Notes:
1 Aristide R. Zolberg, Creating Political Order: The Party-States of West Africa (Chicago: Rand McNally, 1966), pp. 34–35.
2 Frantz Fanon, The Wretched of the Earth (New York: Grove Press, 1963), p. 61.
3 Raymond F. Betts, Decolonization (New York: Routledge, 2004), p. 55.
4 Jeffrey Herbst, States and Power in Africa: Comparative Lessons in Authority and Control (Princeton: Princeton University Press, 2014), p. 17.
5 Jean Allman, “Between the Present and History: African Nationalism and Decolonization,” in Oxford Handbook of Modern African History, eds. John Parker and Richard Reid (Oxford: Oxford University Press, 2013), pp. 224–242, here p. 230.
6 Elizabeth Schmidt, Mobilizing the Masses: Gender, Ethnicity, and Class in the Nationalist Movement in Guinea, 1939–1958 (Portsmouth, NH: Heinemann, 2005).
7 John Lonsdale, “The Moral Economy of Mau Mau: Wealth, Poverty and Civic Virtue in Kikuyu Political Thought,” in Bruce Berman and John Lonsdale, Unhappy Valley: Conflict in Kenya and Africa (Oxford: James Currey, 1992), pp. 315–504.

Kontakt

norman.aselmeyer@history.ox.ac.uk

Companies and the Colonial Past

3 months 2 weeks ago
Weinheim/Germany   Organizer: Gesellschaft für Unternehmensgeschichte e.V. Location: Freudenberg & Co. KG Postcode: 69469

Date: 09.10.2025 - 10.10.2025

Website: https://unternehmensgeschichte.de/Veranstaltungskalender

On 9 and 10 October, the Society for Business History Germany is hosting its academic symposium on "Companies and the Colonial Past" at Freudenberg in Weinheim, Germany. The conference will examine the historical entanglements of companies and colonialism, as well as their lasting effects.

Companies and the Colonial Past

Companies operate in a globalized world—and they did so 150 years ago, in a world profoundly shaped by colonialism and imperialism. While the age of colonialism is over, its legacies continue to shape global inequalities, economic structures, and cultural narratives.

In recent years, colonial history—especially German colonialism—has become a vital and dynamic field of academic inquiry. Scholars are examining the role of private business actors in colonial expansion, the economic dimensions of imperial rule, and the long-term effects of colonial systems on global capitalism. Approaches such as the New History of Capitalism and research on global commodity chains have sharpened the focus on economic entanglements. At the same time, the increasing availability of corporate archives is opening up new methodological and empirical avenues for research.

This symposium provides a forum for this growing body of research and aims to foster dialogue between historians, companies, and other relevant stakeholders. It addresses both thematic and methodological questions concerning German companies and their colonial pasts. “Colonial past” is understood in the broadest possible sense, encompassing corporate activities in any colonial context—from the age of imperialism through decolonization and into the postcolonial present.

The program focuses in particular on the role of companies—especially German ones—in shaping, maintaining, and benefiting from colonial structures. It is organized around four thematic blocks:

- Archives and Sources, highlighting the potential and challenges of corporate records in exploring colonial entanglements;
- Trade and Consumption, examining trading practices and consumer cultures in colonial contexts;
- Engagements, Markets, and (Post)Colonial Conditions, and
- Infrastructure, addressing how businesses contributed to the development and exploitation of colonial infrastructure.

Today, companies are increasingly confronted with calls for transparency and engagement regarding their historical entanglements in colonial contexts. The symposium thus also aims to contribute to historically grounded, research-based perspectives on corporate responsibility, remembrance culture, and the role of business in colonial and postcolonial history.

The conference will be held in English.

Please register for the event via the following link:
https://unternehmensgeschichte.de/public/symp2025

You can also register via the GUGwebsite:
https://unternehmensgeschichte.de/Veranstaltungskalender

The Symposium is organized by Prof. Dr. Alexander Engel, Dr. Marie Huber, Prof. Dr. Nina Kleinöder, Dr. Martin Müller, and Prof. Dr. Joachim Scholtyseck.

For questions regarding the academic program, please contact Nina Kleinöder: nina.kleinoeder@uni-bamberg.de

For organizational matters, please contact Christiane Borchert:
borchert@unternehmensgeschichte.de

Programm

Thursday, 9 October 2025

13:30 - Welcome and Introductions
Joachim Scholtyseck, University of Bonn
Nina Kleinöder, Otto-Friedrich-University Bamberg
Dr. Michael Horchler, Freudenberg & Co. KG

Archives and Sources

14:00 - Colonialism as an Agent of Commerzbank’s Ascent? An Archivist’s View
Matthias Kemmerer, Commerzbank AG

14:45 - Colonialism, Decolonization, and the Pharmaceutical Industry: Archival Sources from Boehringer Mannheim in Context
Tristan Oestermann, Leibniz Centre for Contemporary History Potsdam

15:30 - Coffee Break

Trade and Consumption

16:00 - Sustaining Exploitation: "The General Store" in "Pre-Colonial" Namibia
Martin Kalb, Bridgewater College, Virginia

16:45 - From Colonial Goods Store to Retail Chain: "Kaiser's Kaffeegeschäft" between Colonial Trade and Consumption in the early 20th Century
Sabrina Schmitz-Zerres, University of Munster

17:30 - The Ignorance of the Colonial within a (Post-)Colonial Product. Snuff Tobacco and the Company Gebrüder Bernard
Michael Rösser, Center for Commemorative Culture, University of Regensburg

19:15 - Joint Dinner

Friday, 10 October 2025

Engagements, Markets, and (Post)Colonial Conditions

10:00 - From the Palm Trees of Africa to the Snowfields of Siberia
Anka Steffen, University of Vienna

10:45 - Global Corporations and the Agrochemical Transformation of (post)colonial Egypt, 1910s–1950s
Omri Polatsek, Max Planck Institute for the History of Science / TU Berlin

11.30 - An Anti-Decolonization Bloc? Rössing in Apartheid Namibia
Jayita Sarkar, University of Glasgow

12:15 - Lunch

Infrastructure

13:15 - Engines of Empire: The Woermann Business Group and German Colonialism
Kim S. Todzi, University of Hamburg

14:00 - Electrifying Colonialism? – The Electrical Company Allgemeine Elektrizitäts-Gesellschaft and the Construction of a Hydroelectric Power Station at the Victoria Falls
Thomas Irmer, Berlin School of Economics and Law

14:45 - Closing Discussion

15:15 - End of Event

Kontakt

Christiane Borchert: borchert@unternehmensgeschichte.de

CfP: 7th International Conference of the Mediterranean Maritime History Network

3 months 2 weeks ago

Conference website: https://conference.unizd.hr/mmhn2026/ 

University of Zadar, Department of History announces the 7th International Conference of the Mediterranean Maritime History Network (MMHN), which will take place at the University of Zadar in Zadar from the 25th to the 29th of May 2026.

The MMHN has a long tradition of bringing together scholars who study the maritime history of the Mediterranean Sea and its linkages to the world. We welcome papers that explore the relationship between humans and the sea in all its facets: on the sea (seamen, ships, navigation, sea trade, war, piracy); around the sea (maritime communities, islands, port cities, shipping, shipping-related, fishing and touristic businesses); in the sea (fishing, marine resources, environment); because of the sea (maritime transport systems and entrepreneurial networks, maritime empires, international and national maritime institutions and policy); and about the sea (the maritime culture and heritage, the ideology, the myths and poems of a sea, the impact of the sea on art).

If you are interested in participating, we kindly request that you submit a title and an abstract of no more than 300 words, accompanied by a brief biographical note of 200 words, no later than September 30th, 2025. If you would like to present a panel (3-4 speakers), please send the individual abstracts into one file, providing a title and an abstract for the panel topic of no more than 200 words.

Submissions in English are welcome and should be sent to: mmhn.zadar@gmail.com

Checked
2 hours 23 minutes ago
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